Les Héritiers de Léopold II ou l'Anticolonialisme Inpossible - Tome 1

DE BOECK Guy
Les Héritiers de Léopold II ou l'Anticolonialisme Inpossible - Tome 1
Avertissement
Aux lecteurs de la deuxième édition
Il y a, en général, deux raisons à une réédition. La première, c’est l’épuisement en librairie de
l’ouvrage concerné. La seconde, la mise à jour d’un ouvrage pour tenir compte des progrès de la
science, ce qui, en matière historique, signifie la mise en œuvre de matériaux d’archives jusque là
inconnus ou inaccessibles.
Je n’ai bien sûr aucune raison d’invoquer la première, puisque Les Héritiers… n’a été vendu
que par souscription et n’a jamais été mis en vente en librairie. Cela tient en partie à la faiblesse des
moyens financiers dont disposait Dialogue des Peuples, en partie au fait que les hommes et les femmes
les plus susceptibles de rechercher les informations qu’ils pourraient trouver dans ce livre, je veux dire
l’immence majorité tant des Belges que des Congolais des classes populaires, ne disposent de toute
façon pas de l’argent nécessaire à son achat, même si j’ai, dès le départ, rejeté l’idée de toucher en
quelque façon que ce soit des droits d’auteur et si Dialogue des Peuples s’est efforcé de maintenir le
prix du livre papier le plus bas possible.
Diffuser plus largement ce livre, tout en contournant les problèmes matériels posés par l’édition
imprimée est devenu possible, entre temps, en recourant aux NTIC, et en distribuant l’ouvrage sous
format informatique uniquement, au nom de laliberté de la science et de laculture, suivant une formule
inspirée de Creative Commons (CC). CC est une association à but non lucratif dont le but est de proposer une solution alternative
légale aux personnes souhaitant libérer leurs œuvres des droits de propriété intellectuelle standard de
leur pays, jugés trop restrictifs1. L’organisation a créé plusieurs licences, connues sous le nom de
licences Creative Commons. Ces licences, selon leur choix, ne protègent aucun ou seulement quelques
droits relatifs aux oeuvres.
En pratique, cela signifie que l’œuvre peut être téléchargéée gratuitement et rediffusée de
même. La seule obligation de celui qui la rediffuse, et qui, en plus d’être une régle légale, est d’ailleurs
de pure courtoisie, est de citer sa source.
Ce passage de l’édition sur « papier payant » à la diffusion électronique gratuite était donc la
principale raison de cette réédition. Il n’empêche que, venant plus de dix ans après la première, elle a
subi quelques modifications, son auteur ne se prenant pas pour Horace et ne se croyant aucun droit à
prétendre « exegi monumentum aere perennius ». Ces modifications sont de deux ordres :
La plus visible est une nouvelle répartition des matières. Dans son édition-papier, Les
Héritiers … comprenait trois volumes, « Le temps du Roi » (1885 – 1908), « LeTemps des Héritiers »
(1908 – 1940) et « LeTemps du Refus » (1940-1960) accompagnés d’unopuscule reprenant deux autres
textes « Le Roi dans la bouteille à encre » et « Le Congo en vitrine », offert comme une sorte de
« prime » aux acheteurs de l’œuvre principale. D’autre part, à l’époque, mon livre « Baoni – Les
révoltes de la Force Publique sous Léopold II. Congo 1895 – 1908 » était toujours disponible en
librairie, et le désir de ne pas « torpiller » les droits de mon édieur m’avait poussé à n’évoquer ces fait
que de manière fort succincte dans Les Héritiers… Cette œuvre étant aujourd’hui épuisée en version
papier, quoique toujours disponible en téléchargement1
, ces scrupules n’avaient plus de raison d’être.
Enfin, il y a l’apport de la polémique. Ce que j’ai écrit sur le Congo a été attaqué sur divers points par
des auteurs qui ne partagent pas mes idées2
, ce qui m’a amené à préciser et à approfondir mes vues
pour leur répondre. Il s’agit, notamment, de l’utilisation des écrits de Thonner, de l’appréciation du
1 http://www.congoforum.be/fr/congodetail.asp?subitem=21&id=164152&Congofiche=selected
2 Ces discussions se sont reflétées, au fil du temps, dans « Dialogue », Série « Pourquoi ne pas raconter tout l’histoire du
Congo ? ».
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témoignage du Cdt Bodart, de la valeur de Jozef Conrad, non en tant qu’écrivain, mais comme
« témoin » du Congo léopoldien et de certains choix méthodologique de Jean Stengers… Autant valait,
bien sûr, partager avec mes lecteurs ces approfondissements at ces précisions.
Comme l’on s’en doute, tous ces apports, qui concernaient pricipalement les parties 1 et 2 en
auraient fait des volumes assez lourds à manier, même sous forme informatique. Il en résulte une
nouvelle répartition des matières, avec un volume « Le Temps de la Reprise » consacré essentiellement
aux événements des années 1904 à 1911.
En second lieu, je me suis efforcé d’intégrer au corps de l’ouvrage des documents anciens
récemment publiés et de citer, lorsqu’il y avait lieu, des travaux historiques parus depuis la première
édition des Héritiers… Ainsi, il a été tenu compte de la publication des Notes de voyage du Prince
Albert et d’autres piéces anciennes d’archives récemment exhumées ou du livre de C. Braeckman sur
Lumumba : un crime d’état’. A propos des sources et de leur utilisation, je crois bon de rappler que Les Héritiers… n’est pas
et ne prétend nullement passer pour une « Histoire du Congo », ni même pour une « Histoire du Congo
de 1885 à 1960 ». Son but est seulement de parcourir cette histoire de la colonisation léopoldienne,
puis belge en cherchant la réponse à quelques questions : « Dans quelle mesure la Belgique – ou une
certaine classe dirigeante belge – a-t-elle accepté l’héritage de Léopold II ? Cet héritage a-t-il eu lieu
pour rompre avec la colonisation léopodienne, ou pour la poursuivre ? Comment ce pays d’abord
hostile à la colonisation en est-il arrivé, un demi-siècle plus tard, à se prendre pour « l’exception
belge », pour un colonisateur idéal ? Qu’est-ce qui a rendu l’anticolonialisme impossible ? »
Cela suppose certes de parcourir l’histoire de la période coloniale au Congo, mais non de faire
un exposé exhaustif et systématique de l’histoire de ce pays depuis les origines les plus lointaines
jusqu’à nos jours. Un tel ouvrage existe d’ailleurs déjà : l’Histoire du Congo d’Isidore Ndaywel è
Nziem.
En 2012, un livre sur le Congo a même été considéré par beaucoup comme le «livre de
l’année». Il s’agissait, bien sûr de « Congo… Une histoire » de David Van Reybrouck. Ce mélange
magistral de reportage, d’historiographie et de littérature a obtenu des critiques dithyrambiques et
remporté prix sur prix… Ce que l’auteur produit surtout sans effort apparent, c’est une prose élégante,
souvent magnifique.
C’est éffectivement une belle histoire, mais ce n’est pas un ouvrage historique. C’est une
splendide évocation littéraire du Congo et de son histoire, un de ces ouvrages de non-fiction historique
qui allient histoires vécues et analyse de ces histoires en transmettant avec virtuosité données pures et
vue d’ensemble. De la préhistoire aux premiers chasseurs d’esclaves, du voyage de Stanley missionné
par Léopold II à la décolonisation, de l’arrivée de Mobutu puis de Kabila à l’implantation industrielle
d’une importante communauté chinoise, ce livre retrace, analyse, conte et raconte quatre vingt-dix
mille ans d’histoire : l’histoire du Congo, cet immense territoire africain au destin violent. Le monde s’est passionné alors pour cet ovni littéraire qui entrecroisait approches
historiographique, littéraire et journalistique…
L’on a eu raison de se passionner, car si c’estbien « une histoire » plutôt qu’un ouvrage
historique, David Van Reybrouck y a écrit au moins un message prophétique. Il nous dit que le Congo
n’est pasun souvenir de notre passé, mais une préfiguration de notre avenir.
Le sort des Congolais, enfermés depuis Léopold II dans le rôle de prolétariat famélique d’un
pays regorgeant de richesses qui ne profitent qu’à quelques « Héritiers » dont, au fil du temps, ne
change que la couleur de peau, mais pas la rapacité, c’est le sort qui nnous attend tous.
Car on ne sait pas encore si l’Homme survivra eu changement climatique, et cela en inquiété
beaucoup.Mais il est clair que ni l’Homme, ni le Climat, ni la Planète ne suvivront longtemps encore à
la malfaisance du Capitalisme.
DE BOECK Guy@ wikipedia