Au Gabon, la mécanique du népotisme s’enraye

Olivier PIOT dans Le Monde Diplomatique
Au Gabon, la mécanique du népotisme s’enraye
Violente répression postélectorale

Au Gabon, la mécanique du népotisme s’enraye
Contrairement à un scénario bien ficelé depuis des décennies, la France n’a pas reconnu immédiatement l’élection, contestée et suivie d’émeutes, du président gabonais le 31 août dernier. Que M. Ali Bongo parvienne ou non à se maintenir au pouvoir, il s’agit d’un tournant dans l’histoire de ce petit pays d’Afrique centrale, symbole d’une « Françafrique » vacillante.


Boris Nzebo. – « Le vainqueur écrit l’histoire » (diptyque), 2016
(Exposition à la galerie Jack Bell du 4 au 21 octobre 2016) / Jack Bell Gallery, Londres
«On n’organise pas des élections pour les perdre. » Bien connue des Gabonais, cette formule attribuée à Omar Bongo, qui dirigea le pays de 1967 à 2009, résonne avec une acuité toute particulière à Libreville. La crise postélectorale qui a débuté le le 31 août 2016 apparaît comme une réplique quasi parfaite de celles qui ont régulièrement embrasé le Gabon depuis 1990, date de l’instauration du multipartisme. Avec une différence de taille : l’Union européenne, la France et l’Organisation des Nations unies (ONU) ont, cette fois, d’emblée appelé au respect de la « transparence » des résultats, se départissant ainsi du silence qui avait tant pesé lors de l’élection de 2009 (1). À l’époque, la succession de feu Omar Bongo, doyen des chefs d’État africains et grand ami de la France, était à l’ordre du jour. L’annonce de la victoire de M. Ali Bongo avait aussitôt suscité les plus vives critiques de l’opposition, qui dénonçait des fraudes dans le décompte des voix. Missions internationales d’observation (Union européenne, Union africaine, Organisation internationale de la francophonie), manifestations réprimées, plaintes déposées devant la Cour constitutionnelle… rien n’y fit. Le fils présumé (2) succéda donc au père, sous le regard bienveillant du président français de l’époque, M. Nicolas Sarkozy, qui félicita son « ami » avant même la décision de la Cour constitutionnelle.

Avec un score officiel de 41,79 % lors d’un seul et unique tour, M. Bongo avait alors officiellement devancé ses deux concurrents, MM. Pierre Mamboundou (25,64 %) et André Mba Obame (25,33 %). Par la suite, plusieurs enquêtes attestèrent que les scores avaient été truqués. Dans un documentaire diffusé sur la chaîne de télévision France 2 en décembre 2010, M. Michel de Bonnecorse, ex-conseiller Afrique du président Jacques Chirac, accrédita cette version des faits (3).

Quelques mois plus tard, en février 2011, les câbles WikiLeaks la confirmaient : « Octobre 2009, Ali Bongo inverse le décompte des voix et se déclare président », écrivait l’ambassadeur des États-Unis à Paris, M. Charles Rivkin, dans un télégramme transmis en novembre 2009 à la secrétaire d’État, Mme Hillary Clinton, qui conseilla aussitôt à M. Barack Obama de ne pas reconnaître la victoire de M. Bongo (4)… Sans succès, le président américain recevant même son homologue en 2011. Le 16 janvier dernier, sur le plateau de l’émission « On n’est pas couché » (France 2), le premier ministre Manuel Valls avait lâché par mégarde qu’en 2009 M. Bongo n’avait pas été élu « comme on l’entend »…

Un taux de participation de 99,93 %
En 2016, ce sont les résultats officiels de la province du Haut-Ogooué, la terre ancestrale de la famille Bongo, qui font à nouveau polémique : 95,46 % des électeurs se seraient prononcés en faveur du président sortant, avec un taux de participation de 99,93 % ; ce qui signifie que seuls 50 électeurs sur les 71 714 inscrits se seraient abstenus ! Le Haut-Ogooué serait-il tout simplement un fief acquis au clan Bongo ? « Pas du tout, il faut en finir avec ce mythe : Ali n’y a plus du tout le soutien dont bénéficiait son père », s’insurge Mme Claire H., profession libérale, très en vue au Gabon (5). Alors, pourquoi cette province administrative se retrouve-t-elle sous les projecteurs ? « Ali s’est fait surprendre par le vote dans les huit autres provinces, commente Gustave D., journaliste d’investigation gabonais. Même si quelques ajustements frauduleux y ont été réalisés, l’écart en faveur du candidat de l’opposition Jean Ping était énorme — autour de soixante mille voix. Le pouvoir a donc dû concentrer la fraude dans le Haut-Ogooué pour rattraper le retard et passer juste devant. »

Trop grosse et précipitée, la ficelle s’est progressivement transformée en corde à pendu. Détentrice d’une partie importante des 297 procès-verbaux de cette région où elle avait diligenté des observateurs, « la mission d’observation de l’Union européenne ne pourra pas fermer les yeux. C’est une simple question de temps », assure M. Pierre P., un célèbre avocat gabonais de Libreville.

Chargé du recours déposé en 2009 par l’opposition devant la Cour constitutionnelle, ce juriste connaît bien le dossier. « La mission européenne d’observation électorale au Gabon est tenue, par son contrat, au respect de la souveraineté gabonaise et de ses procédures. Mais, en parlant d’“anomalies” dans son rapport préliminaire, elle a cette fois mis en garde Ali Bongo. » Pour autant, le scénario de 2009 n’est-il pas en passe de se répéter ? « Non ! Le Gabon de 2016 n’est pas celui de 2009, commente M. Michel K., un ancien haut fonctionnaire toujours proche de la famille Bongo. Certes, la présidente de la Cour, Marie-Madeleine Mborantsuo, est toujours aussi inféodée au pouvoir ; mais la société, elle, a changé. Ali n’a pas l’envergure de son père. En quelques années, il a transformé le système centralisé et unitaire de celui-ci en une véritable prédation dynastique, exacerbant la volonté farouche de changement des Gabonais. »

C’est bien dans un double mouvement de continuité et de rupture que s’est inscrit le régime de M. Bongo. Et, curieusement, ces deux tendances nourrissent la crise politique actuelle. Continuité d’abord, car la prospérité de la République gabonaise repose sur une stratégie de rente inchangée depuis l’indépendance du pays, en 1960 : l’économie est entièrement consacrée à la production et à l’exportation de ressources naturelles. « À l’époque coloniale, c’est le bois précieux de l’okoumé qui faisait vivre le pays et l’Afrique-Équatoriale française tout entière. Par la suite sont venus s’ajouter le manganèse, l’uranium et, bien sûr, le pétrole », nous rappelle le géographe Roland Pourtier, professeur émérite à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne (6). En 1975, le Gabon rejoint l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Pour faciliter cette adhésion, le président Albert-Bernard Bongo adopte alors le nom musulman d’El Hadj Omar Bongo. S’ouvre ensuite une période faste pour l’économie nationale, dite des « douze glorieuses », jusqu’au contre-choc pétrolier de 1985, puis de nouveau un épisode prospère, de la fin des années 1990 jusqu’en 2014.

À l’exploitation du bois — 85 % du territoire est recouvert de forêts — ont donc succédé les « cycles miniers » puis le pétrole. Partant d’une production de 250 000 barils par jour en 1975, le pic de la production de pétrole est atteint en 1997 (350 000 barils par jour, soit une production annuelle record de 18,5 millions de tonnes). Le Gabon fait alors figure d’« émirat tropical ». Avec une population modeste (1,8 million d’habitants en 2013), l’État vit de ses rentes, au gré des fluctuations des cours des matières premières. Au cœur du dispositif, « de grosses entreprises, essentiellement françaises, dans différents secteurs (bois, pétrole, uranium), et un État gabonais qui entre systématiquement dans leur capital à hauteur de 20 % », poursuit Roland Pourtier. Pourvoyeuse de milliards de francs CFA pendant presque quatre décennies et source d’enrichissement pour les élites au pouvoir, la rente des matières premières n’a été que très marginalement réinvestie dans l’économie du pays. « L’État rentier gabonais a fonctionné durant des années sur la prédation des ressources au profit de sa classe dirigeante », autour de laquelle « s’est développé un capitalisme parasitaire qui n’a guère permis d’améliorer les conditions de vie des populations, loin de là », souligne le politologue Thomas Atenga (7).

Longtemps emblématique de la « Françafrique » (lire « L’élève modèle de la “Françafrique” »), le Gabon s’est doté d’un État centralisé avec à sa tête Omar Bongo, inventeur d’un mode de redistribution fait de corruption et de prébendes habilement réparties entre les régions, les ethnies et les forces politiques du pays. Ce partage (très partiel) de la rente suivait une logique aujourd’hui bien connue. Il empruntait des canaux officiels — via des « enveloppes » versées dans l’entourage du pouvoir et le maillage des administrations territoriales — et des voies officieuses — via des dons personnels du « chef-président » au gré des crises sociales (universités, hôpitaux, etc.) et le réseau des maîtresses du président et de son entourage. « À une époque, des quartiers entiers de Libreville vivaient de ces largesses dictées par le “vagabondage sexuel” des élites dirigeantes », rappelle Roland Pourtier. Cette structure étatique de « rente-corruption » a été finement étudiée par de nombreux universitaires, français ou américains (8).

La malédiction du pétrole
Héritier de la dynastie Bongo depuis 2009, le fils n’a pas fondamentalement modifié l’organisation millimétrée concoctée par son père. « Pour l’essentiel, l’État gabonais et son économie fonctionnent dans la continuité », commente encore Roland Pourtier. Mme Marie-Madeleine Mborantsuo (alias « 3M »), par exemple, ex-maîtresse de feu Omar Bongo et présidente de la Cour constitutionnelle (une instance créée en 1991, dans la foulée de l’instauration du multipartisme), occupe ce poste stratégique depuis plus de vingt ans…

Sur le plan économique, M. Bongo s’était en 2009 présenté aux suffrages de ses concitoyens avec un ambitieux « plan stratégique du Gabon émergent » (PSGE), articulé autour de l’industrialisation et de la gestion durable des ressources. Le PSGE, qui était censé donner de nouvelles perspectives au pays, recoupait la volonté affichée par de nombreux dirigeants africains d’atteindre l’« émergence » grâce à une « intégration gagnante » dans la mondialisation. Il obéissait aussi aux injonctions des institutions internationales (Banque mondiale, Fonds monétaire international), celles-là mêmes qui avaient imposé les plans d’ajustement structurel dans les années 1990. Le PSGE a donné lieu à quelques innovations. Dans la filière bois, par exemple, les compagnies étrangères se sont vu imposer l’obligation de transformer les grumes avant exportation. Une usine de meubles est ainsi née de cette volonté de maîtriser la valeur ajoutée par des transformations industrielles locales. Dans l’agroalimentaire également, des investissements ont été réalisés, au profit notamment d’une extension des plantations de palmiers à huile et d’hévéas. Mais, après sept années de pouvoir, aucune de ces initiatives n’a réussi à limiter le poids de la rente pétrolière ou à sortir le pays de sa dépendance alimentaire (80 % de produits importés) — un schéma typique de la « maladie hollandaise » qui affecte les économies adossées aux matières premières (9).

Dans les faits, la seule rupture d’envergure est venue de l’inversion des cours du pétrole. Certes, en 2016, le Gabon demeure le quatrième producteur d’or noir de l’Afrique subsaharienne, derrière le Nigeria, l’Angola et le Congo-Brazzaville. Mais cette manne si essentielle à l’État (70 % des exportations, 20 % du produit intérieur brut et 40 % des recettes budgétaires) a fondu après le choc économique de l’été 2014. Après avoir franchi la barre des 100 dollars deux ans plus tôt, le prix du baril a chuté sous les 40 dollars en 2016. Résultat : la dette publique flambe, grevant le budget et les investissements. Port-Gentil, la capitale économique du pays, reste asphyxiée par ce retournement. En un an, les acteurs de la filière pétrole (Total, Shell, Vaalco, etc.) ainsi que les sous-traitants (Schlumberger, Addax Petroleum, Satram, etc.) ont stoppé net les investissements, fermé certains sites et licencié massivement. Selon l’Organisation nationale des employés du pétrole, près de 4 000 emplois (sur une population de 140 000 habitants) y ont été précarisés ou perdus en dix-huit mois.

Un retournement conjoncturel de cet ordre (qui a aussi, selon la Banque mondiale, frappé des secteurs comme l’agroalimentaire, la construction, le bois et les transports) affecte très vite le cœur même de la société (10). En effet, comme l’État rentier et prédateur laisse peu aux citoyens pour s’en sortir au quotidien, le moindre dérèglement se traduit par des drames sociaux. Si le pays caracole en tête des pays africains pour ce qui est du revenu par habitant — calculé en parité de pouvoir d’achat, le PIB par habitant est passé de 15 100 dollars en 2009 à 20 100 dollars début 2015 —, il dégringole au 112e rang mondial de l’indice de développement humain, qui intègre des critères sociaux comme l’accès aux soins ou à l’éducation. Plus de la moitié des Gabonais se trouvent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté.

La conjonction de ces facteurs — persistance de l’État rentier, corruption, forte dégradation économique et sociale — explique la profondeur et la radicalité de la crise politique ouverte fin août 2016. Au cours des dernières années, la vie quotidienne dans la capitale comme dans la plupart des autres villes (85 % de la population du pays réside en zone urbaine) s’est dégradée au point de désagréger un tissu social précaire. La liste des maux quotidiens des Gabonais comprend à la fois la paupérisation d’une jeunesse frappée par le chômage (autour de 30 % de la population active, dont 60 % sont des jeunes), des arrestations expéditives lors des manifestations étudiantes ou syndicales (nombreuses depuis janvier 2016), la dégradation de l’accès aux soins (une caution de 300 000 francs CFA, soit 450 euros, est désormais exigée pour entrer à l’hôpital), déficience des services publics, coupures récurrentes d’électricité…

Telles sont les facettes d’une violence qui « recouvre les actes physiques autant que les actions ou interactions engendrant des agressions psychologiques et des disqualifications sociales, et [qui] inclut les coercitions et les actes de violence ordonnés par l’État et ses représentants (11) ». Cette brutalité multiforme se retrouve dans la radicalisation d’une partie de la culture hip-hop massivement adoptée par la jeunesse dans les années 1990.

« La plupart des membres de l’opposition craignent à présent pour leur vie à Libreville, lâche le journaliste gabonais Gustave D. Les forces répressives d’Ali Bongo ont intégré des “mercenaires encagoulés” chargés des basses besognes. » Le 8 septembre, l’opposant Jean Ping s’est finalement résolu à déposer un recours devant la Cour constitutionnelle. « Je connais bien les arcanes de cette institution, commente l’avocat Pierre P. Comme toujours au Gabon, les apparences de démocratie sont sauves. Nous avons cette cour ainsi qu’une Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap) : deux institutions censées garantir la transparence et le respect de la loi. Mais grattez un peu et vous verrez le vrai visage de ces autorités : elles sont littéralement phagocytées par le pouvoir. Voilà pourquoi le camp de Jean Ping a si longtemps hésité avant de déposer plainte. »

En reprenant la composition (neuf juges, dont trois nommés par le président de la République, trois par le président du Sénat et trois par le président de l’Assemblée nationale, deux proches du clan Bongo) et l’histoire de la Cour constitutionnelle (sa présidente vient d’être reconduite pour un quatrième mandat de sept ans !), une conviction se forge : cette institution ne paraît guère avoir usurpé son sobriquet de « tour de Pise », penchant toujours du même côté, celui du pouvoir. Les Gabonais savent à quoi s’en tenir. Depuis des décennies, leur État les a habitués à un vaste jeu d’ombres où chaque secret est à la fois bien gardé et connu de tous.

Mobilisation de la rue
Une autre différence de taille distingue l’élection de 2016 de celle de 2009 : la mobilisation de la population, des associations, des syndicats... Convaincus de s’être fait « voler » le scrutin de 2009, de très nombreux Gabonais se sont mobilisés, encouragés par des événements extérieurs : la vague du « printemps arabe » de 2011 et la chute de régimes autocratiques, la défaite de M. Sarkozy (l’« ami » de M. Bongo) à la présidentielle française de 2012, et surtout l’effondrement du pouvoir autocratique de M. Blaise Compaoré au Burkina Faso en 2014 (12). Après le boycott des élections législatives par l’opposition, en 2011, plusieurs organisations se sont structurées pour promouvoir des réformes politiques et institutionnelles. Le mouvement Ça suffit comme ça !, par exemple, s’est fixé dès 2012 comme objectif un meilleur gouvernement et… la transparence de l’élection de 2016. Il a mené un intense travail de lobbying auprès des autorités françaises et internationales, au travers notamment de nombreuses conférences organisées à Paris et à Strasbourg.

À plusieurs reprises, cette organisation — comme d’autres mouvements civiques — a alerté sur les risques de fraude à l’approche du scrutin d’août dernier. Le président François Hollande a ainsi reçu un document de « sortie de crise » dès son arrivée au pouvoir en mai 2012. Le désistement de divers candidats au profit de la liste unique menée par M. Ping a été la dernière étape de cette stratégie d’anticipation. Cette mobilisation politique et juridique suffira-telle à briser l’épine dorsale du clan Bongo ? Ancien ministre de la défense (1999-2009), M. Bongo peut sans doute compter sur la loyauté de son armée et de sa police. Mais ces corps organisés sont eux aussi traversés par des pressions sociales et familiales. M. Compaoré en a fait l’expérience en 2014, tout comme M. Zine El-Abidine Ben Ali en Tunisie en 2011. Quant aux soutiens extérieurs, le président sortant ne dispose que de peu d’alliés sûrs sur le continent. Surtout, et contrairement au scénario de 2009, Paris, Washington, Strasbourg et Addis-Abeba (siège de l’Union africaine) ont publiquement regretté certaines « anomalies » dans le scrutin et exigé le respect de la « transparence » en demandant un « recomptage » des voix, bureau par bureau, en présence d’observateurs internationaux.

Paris, 18 septembre 2016. L’avocat Pierre P. commente les récentes attaques du pouvoir contre le champion de l’opposition. « Ils n’ont pas compris que personne ne se fait beaucoup d’illusions sur Ping et sur son programme s’il devait arriver au pouvoir, plaide-t-il calmement. C’est un ancien du clan Bongo, personne ne l’a oublié. Mais c’est derrière sa bannière que la dynastie Bongo peut tomber, et c’est cela le plus important. » Soudain, l’avocat prête une oreille attentive à son poste de radio. En visite dans la capitale française, M. Séraphin Moundounga, garde des sceaux fraîchement démissionnaire (il a rendu son portefeuille le 6 septembre), fait part des « craintes » qu’il éprouve pour sa vie sur les ondes de Radio France Internationale (RFI). Il dénonce la répression politique et les tentatives d’assassinat dont il aurait été victime au Gabon. « L’histoire est en marche, lâche M. Pierre P., le regard brillant. Cette fois, le peuple gabonais ne se laissera pas déposséder de son élection. Si les recours juridiques et les instances internationales d’observation ne poussent pas Bongo à accepter la transparence et sa défaite, c’est par la rue que les Gabonais rendront leur verdict. » Reste à savoir à quel prix.

Parti pour effectuer un reportage avec toutes les autorisations nécessaires, Olivier Piot a été refoulé sans ménagement à son arrivée à Libreville le 9 septembre.

Olivier Piot
Journaliste.

(1) Lire Philippe Leymarie, « Au Gabon, Ali Bongo joue avec le feu », Défense en ligne, 31 août 2009.

(2) Depuis les années 2000, la filiation de M. Ali Bongo fait polémique : est-il bien le fils d’Omar Bongo ou bien un enfant adopté au Biafra dans les années 1950 ? L’enjeu est de taille puisque la naissance au Gabon conditionne le droit de se présenter à une élection.

(3) Cf. le film de Patrick Benquet, Françafrique : 50 années sous le sceau du secret, Infrarouge, 2011.

(4) Cf. notamment Régis Marzin, « Gabon : du coup d’État électoral de 2009 au départ anticipé d’Ali Bongo ? », blog Regard excentrique, 2 janvier 2015.

(5) Pour des raisons de sécurité, certains de nos interlocuteurs ont souhaité conserver l’anonymat.

(6) Auteur notamment de l’ouvrage Le Gabon (deux tomes), thèse d’État publiée à L’Harmattan, Paris, 1989.

(7) Thomas Atenga, « Gabon : apprendre à vivre sans pétrole », Politique africaine, no 92, Paris, décembre 2003.

(8) Cf. par exemple Douglas A. Yates, The Rentier State in Africa : Oil Rent Dependency and Neocolonialism in the Republic of Gabon, Africa World Press, Trenton (New Jersey), 1996.

(9) Cf. Bertrand Feutemio, Le Gabon, un pays si riche… mais très pauvre, Publibook, Paris, 2008.

(10) Cf. Banque mondiale, « Gabon. Vue d’ensemble », 2016.

(11) Alice Aterianus-Owanga, Maixant Mebiame Zomo et Joseph Tonda (sous la dir. de), La Violence de la vie quotidienne à Libreville, Academia, coll. « Anthropologie prospective », Louvain-la-Neuve, à paraître en octobre 2016.

(12) Lire David Commeillas, « Coup de Balai citoyen au Burkina Faso », Le Monde diplomatique, avril 2015.
Olivier PIOT dans Le Monde Diplomatique@ wikipedia