15 december 1931: Gustave Le Bon overleden (1841-1931). R.I.P.

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15 december 1931: Gustave Le Bon overleden (1841-1931). R.I.P.
Gustave Le Bon
Gustave Le Bon (Nogent-le-Rotrou, 7 mei 1841 – Parijs, 15 december 1931) was een Frans socioloog en psycholoog. Hij studeerde voor arts en oefende dat beroep ook vele jaren uit, en publiceerde daarnaast boeken en artikelen.

Zijn beroemdheid had hij te danken aan zijn in 1895 gepubliceerde werk La Psychologie des foules (De psychologie der massa's). Le Bon vertolkte hierin de opvatting, dat de individuele persoon, ook als hij lid is van een cultureel hoog ontwikkelde samenleving, in de massa zijn kritische vermogens verliest en zich dan affectief, en vaak ook primitief-barbaars, gedraagt. Een dergelijke massa kan al ontstaan bij een handjevol mensen. In massaal verband treedt de mens eerder op conform de intelligentie van de mínst intelligenten in de groep. In de massasituatie is de individuele persoon lichtgeloviger en ook vatbaar voor propaganda en massapsychoses. Dat heeft tot gevolg dat de massa vaak blind achter een leider aanloopt. Dit verschijnsel zou ook een verklaring zijn voor de populariteit van populistische partijen en demagogen en voor het optreden van volksgerichten en lynchpartijen.

Le Bon zag drie mechanismes die dit collectieve gedrag of deze groepsgeest bewerkstelligden:

anonimiteit, hierdoor voelt men zich minder verantwoordelijk voor het gedrag;
besmetting, emoties verspreiden zich door de massa als besmettelijke ziekte;
suggestibiliteit, in een massa accepteert men suggestie eerder als waar zijnde. Zo is de massa gemakkelijker te leiden door haar een vijandsbeeld voor te houden, dan door een logische gedachte uiteen te zetten.
De theorieën van Le Bon hebben veel invloed gehad op politici als Hitler en Mussolini.
(wiki, 20190512)

Gustave Le Bon, né le 7 mai 1841 à Nogent-le-Rotrou et mort le 14 décembre 19311 à Marnes-la-Coquette, est un médecin, anthropologue, psychologue social et sociologue français.

Polygraphe, il est l'auteur de nombreux ouvrages dans lesquels il aborde le désordre comportemental et la psychologie des foules, dans son oeuvre principale Psychologie des foules parue en 1895.

Le Bon reste une personnalité controversée. Il véhicule une image pseudo-raciste, qui renvoie à « l’idéologie coloniale de son époque2 », liée à des tendances anticléricales, et compte au nombre des anti-colonisateurs.


Sommaire
1 Biographie
2 Psychologie sociale
2.1 Influence
3 Etude des phénomènes révolutionnaires
4 Etude des civilisations
5 La Première Guerre mondiale
6 Redécouverte à l'époque moderne
7 Œuvres
7.1 Ouvrages médicaux
7.2 Voyages, histoire et psychologie
7.3 Recherches scientifiques
8 Articles scientifiques
9 Bibliographie
10 Notes et références
10.1 Notes
10.2 Références
11 Voir aussi
11.1 Liens externes
11.2 Articles connexes
Biographie

Gustave Le Bon en 1929.
Né en 1841 à Nogent-le-Rotrou, Eure-et-Loir, où son père, Jean Marie Charles Le Bon, est conservateur des hypothèques, Gustave Le Bon fait ses études au lycée de Tours. Il entre ensuite à la faculté de médecine de Paris, mais en sort sans avoir obtenu son diplôme3.

Il parcourt l’Europe, l'Asie et l'Afrique du Nord entre les années 1860 et 18804. Il écrit des récits de voyage, des ouvrages d’archéologie et d’anthropologie sur les civilisations de l’Orient4 et participe au comité d'organisation des expositions universelles.

En 1879, il fait une entrée remarquée au sein de la Société d'anthropologie de Paris qui lui décerne l’année suivante le prix Godard pour son mémoire « Recherches anatomiques et mathématiques sur les lois de variation du volume du cerveau et sur leur relation avec l’intelligence »5. En 1888, il démissionne et rompt tout contact avec cette société peu ouverte à ses approches psycho-sociologiques novatrices ; pour lui, « il n'y a pas de races pures dans les pays civilisés »6 et il entend le terme de « race », à l'instar de Taine ou Renan, comme un synonyme de « peuple », c'est-à-dire « un agrégat d'hommes appartenant au même milieu et partageant la même culture (langue, tradition, religion, histoire, coutumes vestimentaires, alimentaires, etc.) ».

« Les classifications uniquement fondées sur la couleur de la peau ou sur la couleur des cheveux n'ont guère plus de valeur que celles qui consisteraient à classer les chiens d'après la couleur ou la forme des poils, divisant, par exemple, ces derniers en chiens noirs, chiens blancs, chiens rouges, chiens frisés, etc.6 »

Au chapitre de la colonisation, Le Bon partage avec l’anthropologue Armand de Quatrefages une position hétérodoxe : le rôle de la puissance colonisatrice devait se borner à maintenir la paix et la stabilité, à prélever un tribut, à nouer ou à développer des relations commerciales, mais en aucun cas ne doit s’arroger le droit d’imposer sa civilisation à des populations réticentes7.

Son premier grand succès de librairie en sciences sociales est la publication en 1894 des Lois psychologiques de l'évolution des peuples, ouvrage qui se réfère aux lois de l'évolution darwinienne en les étendant de la physiologie à la psycho-sociologie.


Tombe au cimetière du Père-Lachaise.
L'année suivante, il écrit Psychologie des foules8, pour lequel il est félicité par Mussolini9.

Le Bon participe par la suite activement à la vie intellectuelle française. En 1902, il crée la Bibliothèque de philosophie scientifique chez Flammarion, qui est un vrai succès d'édition, avec plus de 220 titres publiés et plus de deux millions de livres vendus2 à la mort de Le Bon en 1931. À partir de 1902 il organise une série de « déjeuners du mercredin 1 » auxquels sont conviées des personnalités telles que Henri10 et Raymond Poincaré10, Paul Valéry, Émile Picard, Camille Saint-Saëns, Marie Bonaparte, Aristide Briand, Henri Bergson, etc. Il convie également à ces déjeuners la comtesse Greffulhe, icône de la Belle-Époque et inspiratrice de Proust pour À la recherche du temps perdu, avec qui il entretient une correspondance aussi abondante que familière11.

Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (89e division).

Psychologie sociale
Gustave le Bon a étudié l'influence du déterminisme social et sociologique pour expliquer des comportements sociaux humains.

Dès ses premiers ouvrages, notamment La Vie, physiologie humaine appliquée à l'hygiène et à la médecine et L'Homme et les sociétés, leurs origines et leur histoire, Gustave le Bon recherche les causes des actions des hommes. Il détermine plusieurs causes: les causes biologiques, les causes émotionnelles, les causes rationnelles, les causes collectives et les causes mystiques. Cette analyse de la psychologie humaine va lui permettre d’interpréter des événements historiques et des faits divers restés jusque-là irrationnels et incompréhensibles.

D’une part, à une époque où la méthode devient importante, son « amateurisme » gêne ses contemporains tels que Emile Durkheim2, sans réelle incidence sur son début de carrière.

En 1895, il publie son oeuvre principale, Psychologie des foules, en s'inspirant des théories de la suggestion et l'imitation de Gabriel Tarde. En comparaison, sa théorie des comportements collectifs est plus ambivalente : selon Gustave Le Bon, les foules peuvent être manipulées et ont une capacité destructrice. Dans un même temps, elles sont aussi un moyen pour mener des changements politiques et sociaux12.

A partir de grands événements historiques, il décrit l'action des hommes par le seul fait qu'ils sont en groupe. Les principes qu'il expose dans cet ouvrage formeront les bases d'une nouvelle discipline scientifique : la psychologie sociale. Dans cet ouvrage, il expose une idée fondamentale : les foules sont composées d'asociaux et sont potentiellement « criminelles » comme le pensait Tarde, mais aussi capables d'amour, de sacrifice, d'héroïsme.

Influence
En 2010, Psychologie des foules est choisi par Le Monde et Flammarion comme l'un des « 20 livres qui ont changé le monde »13.

Les idées contenues dans Psychologie des foules jouèrent un rôle important au début du xxe siècle. Si les praticiens du totalitarisme, Mussolini, Hitler, Staline et Mao, passent pour s'être inspirés (ou plus exactement, avoir détourné les principes) de Gustave Le Bon14, beaucoup de républicains – Roosevelt, Clemenceau, Poincaré, Churchill, de Gaulle, etc. – s'en sont également inspirés.


Le visage de Theodore Roosevelt, vingt-sixième président des États-Unis de 1901 à 1909, a été sculpté au Mount Rushmore : deuxième visage en partant de la droite, entre Thomas Jefferson et Abraham Lincoln
« Je n'eus l’occasion de le rencontrer que deux mois avant la guerre, à un déjeuner qui lui était offert par mon éminent ami, Hanotaux, ancien ministre des Affaires étrangères. M. Roosevelt avait désigné lui-même les convives qu'il désirait voir à ses côtés. […] Après avoir parlé du rôle des idées dans l'orientation des grands conducteurs de peuples, Roosevelt, fixant sur moi son pénétrant regard, me dit d'une voix grave : — Il est un petit livre qui ne m'a jamais quitté dans tous mes voyages et qui resta toujours sur ma table pendant ma présidence. Ce livre est votre volume : Lois psychologiques de l'évolution des peuples. »

— Gustave Le Bon, Le Déséquilibre du Monde, page 226, Flammarion

Charles de Gaulle emprunte dans son livre à la gloire de « l'homme de caractère » (Le Fil de l'épée) l'essentiel des thèses de Le Bon, tendant notamment à considérer la suggestion comme le fait élémentaire et irréductible expliquant tous les mystères de la domination. Comme le père de la psychologie des foules, il entend profiter de la crise que l'autorité est réputée traverser pour en saisir l'essence. Cette crise correspond à une évolution par laquelle le principe d'autorité s'adapte à la modernité. Le diagnostic des deux auteurs est le même : l'autorité traditionnelle, attachée à la fonction, est en passe d'être remplacée par la suggestion pure, qui permettra aux chefs de se faire obéir des masses par la seule force de leur personnalité, de plus en plus indépendamment des cadres établis. « Pour de Gaulle comme pour Le Bon, la magie du social tient en un mot : le prestige. » Jean-Baptiste Decherf, De Gaulle et le jeu divin du héros. Une théorie de l'action15.

Dans sa préface, Mathieu Kojascha écarte l’idée que l’ouvrage ait pu faire le lit du fascisme et conclut : « Contribution définitive à la psychologie collective, à la compréhension du phénomène mystérieux qu’est la foule, Psychologie des foules de Gustave Le Bon doit aussi son immense succès au fait que ce personnage étonnant, intrigant, a su exprimer l’inquiétude de ses contemporains, leur perplexité devant certains aspects de la modernité. Perçu comme un texte fondateur de la psychologie sociale, ce livre est donc un formidable document d’histoire. » Ses découvertes lui permirent par ailleurs d'avertir dans un article intitulé De l’évolution de l’Europe vers diverses formes de dictature dès 1924 du fait que la montée du fascisme en Italie n'était pas un phénomène isolé mais risquait au contraire de s’étendre, par le même mécanisme d’un meneur de foules prenant, à la faveur d’événements violents, les rênes du pouvoir et les confisquant ensuite à son seul profit. Sur ce sujet, on se reportera aux ouvrages de Moscovici, Rouvier, Decherf et Korpa.

De fait, Le Bon n’a fait qu’analyser des phénomènes de croyance et de mobilisation collective qui peuvent servir à une rhétorique de conviction démocratique comme à une propagande totalitaire, mettant particulièrement en garde contre les risques de manipulation de l’opinion. Il est connu pour avoir été le premier penseur à avoir pointé du doigt le danger de la mystique de la supériorité de la race aryenne et condamné par avance la montée du nazisme : « L’Allemand moderne est plus dangereux encore par ses idées que par ses canons », écrit-il en 1918 dans Hier et demain. « Le dernier des Teutons reste convaincu de la supériorité de sa race et du devoir, qu’en raison de cette supériorité, il a d’imposer sa domination au monde. Cette conception donne évidemment à un peuple une grande force. Il faudra peut-être une nouvelle série de croisades pour la détruire. »

Ses travaux sur la psychologie des foules furent utilisés dans la première moitié du xxe siècle par des chercheurs en sociologie des médias tels que Hadly Cantril ou Herbert Blumer pour décrire les réactions des groupes face aux médias.

Sigmund Freud, malgré quelques réserves16, indiqua que « par l’accent qu’elle met sur le rôle inconscient de la vie psychique, la psychologie de M. Le Bon se rapproche considérablement de la nôtre »17 Dans son ouvrage Psychologie collective et analyse du moi, paru en 1921, Freud s’appuie sur une lecture critique de Psychologie des foules, il y mentionne les travaux de Le Bon notamment sur « les modifications du Moi lorsqu’il est au sein d’un groupe agissant », et écrit « je laisse donc la parole à M. Le Bon18. »

Dans une étude publiée par le journal anglais The Naval and military Gazette le 8 mai 1909, l'auteur s'exprime ainsi :

« On n'a jamais donné une meilleure définition de l'éducation que celle due à Gustave Le Bon : l'éducation est l'art de faire passer le conscient dans l'inconscient. Les chefs de l'état-major général anglais ont accepté ce principe comme la base fondamentale de l'établissement d'une unité de doctrine et d'action dans l'éducation militaire, dont nous avions si besoin. »

L'auteur de cette étude montre l'application des principes de Gustave le Bon dans les nouvelles instructions de l'état-major anglais : l'instinct et non la raison fait agir sur le champ de bataille, d'où la nécessité de transformer le rationnel en instinctif par une éducation spéciale. De l’inconscient surgissent les décisions rapides. « L'habileté et l'unité de doctrine doivent, par une éducation appropriée, être rendues instinctives ».

Etude des phénomènes révolutionnaires
Gustave Le Bon fournit les analyses psychologiques suivantes :

«

La première phase d'une révolution est consacrée à combattre les nécessités économiques et sociales qui régissent la vie des peuples. L'expérience prouvant bientôt que ces nécessités dominent les volontés, l'ancienne organisation reparaît sous des noms nouveaux. Ainsi se terminera nécessairement la révolution russe.
Les révolutions ne durent jamais longtemps parce qu'elles se heurtent bientôt au mur des nécessités économiques et sociales qui dominent le monde. Percevant alors l'impuissance des théoriciens, la foule se détourne d'eux. Avant d'arriver à cette dernière phase, bien des ruines sont accumulées. La Russie en fait aujourd'hui l'expérience.
D'après tous les enseignements de l'histoire des révolutions, l’extrémisme en politique a comme terminaison nécessaire soit la destruction de la civilisation, soit l'anarchie et la dictature.
Ce n'est pas d'une révolution, mais d'une transformation profonde des idées que résultent les réformes durables.
»

— Les Incertitudes de l'heure présente, 1923

Concernant la Révolution française :

« …Les blessures d’amour-propre sont celles dont le souvenir s’efface le moins. Le Tiers-État en avait supporté beaucoup. À une réunion des États Généraux de 1614 où ses représentants s’étaient vus obligés de rester à genoux tête nue, un membre du Tiers ayant osé dire que les ordres étaient comme trois frères, l’orateur de la noblesse répondit : « qu’il n’y avait aucune fraternité entre elle et le Tiers, que les nobles ne voulaient pas que les enfants de cordonniers et de savetiers les appelassent leurs frères ». »

— Révolution Française et la Psychologie des Révolutions

« La soif d'inégalité semble un besoin irréductible de la nature humaine. On sait avec quelle ardeur les Conventionnels échappés à la guillotine sollicitaient de Napoléon des titres nobiliaires. Le rêve égalitaire qui les avait conduits à tant de massacres n'était donc en réalité qu'un violent désir d'inégalité à leur profit. L'histoire n'a pas encore cité, d'ailleurs, de pays où régnât l'égalité. »

— Les Incertitudes de l'heure présente

Etude des civilisations
Le Bon ne soutient pas la théorie d’une hiérarchisation des civilisations, mais admet des différences au niveau des stades de développement, et soutient la théorie du biologiste darwinien allemand Ernst Haeckel (1834-1919)2. Il consacre un gros volume illustré à la Civilisation des Arabesn 2, et il envisageait l’éveil à venir d'une Afrique encore sous-développée au début du xxe siècle. Après une mission aux Indes, il publie, en 1887, un autre ouvrage majeur, Les Civilisations de l’Inde2. Il se différencie en cela fortement d'Arthur de Gobineau et dénonce à plusieurs reprises dans ses œuvres le « mythe de la race aryenne », mettant en garde contre les visées suprémacistes du national-socialisme dès 1924.
La Première Guerre mondiale
Gustave Le Bon a prédit que la Première Guerre mondiale serait meurtrière car il s’agirait de guerre de conscrits et non plus de professionnels. Ainsi dans Psychologie du socialisme (1898), il écrivait que « les prochaines luttes entre nations seront de véritables luttes pour l'existence ne pouvant se terminer que par l'écrasement complet de l'un des combattants. » Ses idées sur la psychologie ont influencé l'École de guerre, chargée de préparer les officiers. Le Bon a aussi analysé le conflit dans des livres comme Premières conséquences de la guerre (1917).

Voici ce qu'écrit Gustave Le Bon au lendemain de Première guerre mondiale:

« Les peuples ne se résignent pas à la défaite quand ils se croient supérieurs à leurs vainqueurs. Une tentative de revanche germanique peut donc être considérée comme un des plus sûr événements de la future Histoire. »

— Les Incertitudes de l'heure présente, 1923

Redécouverte à l'époque moderne
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Il a été redécouvert en France grâce à Serge Moscovici lors du cinquantenaire de la mort du sociologue en 1981 avec L'Âge des foules qui traite des précurseurs de la psychologie sociale, à savoir Gustave Le Bon, Gabriel Tarde et Sigmund Freud. Pour Moscovici, Le Bon (en qui il voit le « Machiavel des sociétés de masse ») est celui qui, le premier, a saisi l'importance du rôle (potentiellement destructeur) des masses dans le processus historique et en a esquissé la typologie.

En 1977, Catherine Rouvier, après son mémoire soutenu en 1976 avec Roger-Gérard Schwartzenberg à l'université de Paris 2 Panthéon Assas sur « la personnalisation du pouvoir en France de 1875 à 1958 » faisait porter ses recherches en histoire sur la psychologie politique sur Le Bon et montrait que ce dernier était en réalité mal compris car victime d'une confusion courante entre masses et foules.

En effet, l'apport de Le Bon à la psychologie sociale ne concerne nullement les masses — concept très général peu susceptible d'une approche expérimentale. Son véritable sujet d'étude est la foule, définie comme une réunion momentanée d'individus soumis à une émotion forte à la suite d'un événement et/ou d'un discours ou d'une image provoquant la peur, la haine, ou, au contraire, l'enthousiasme et l'amour. Ces découvertes de le Bon s'inscrivent en effet clairement dans le débat qui agite les historiens du xixe siècle sur les causes de la violence et du caractère subit des révolutions, celle de 1789, bien sûr, mais aussi celles de 1830, 1848 et 1870. Cela est donc bien distinct de ce qui sera développé plus tard par Wilhelm Reich, par exemple sur « la psychologie de masses du fascisme ».


Gustave Le Bon par Jean Geiser vers 1880 à Alger
L'état de suggestibilité de la foule est très précisément décrit par ce médecin passionné par les expériences en tout genre, de Charcot sur la guérison de l'hystérie par l'hypnose à la Salpetrière ainsi que par la technique (au départ fondée sur l'hypnose) de la guérison des névroses par Sigmund Freud, avec lequel il correspondit grâce à leur amie commune Marie Bonaparte.

Le concept de horde chez Freud est, du reste, à rapprocher — mais non à confondre — avec celui de foule chez Le Bon. Dans les deux cas, est décrit le phénomène du meneur, qui est celui qui va répondre à l'expectative du groupe, foule ou horde. Mais tandis que la horde est un groupe soumis en permanence aux directives de son chef, la foule n'est éminemment suggestible et donc vulnérable à tout mot d'ordre exprimé avec force que pendant le temps que dure l'excitation due à l'évènement — ou à la mise en scène fictive d'un évènement.

L'intérêt majeur de cette théorie, dite de la « psychologie des foules », est précisément d'introduire, dès la fin du xixe siècle, dans la réflexion politique le concept de plus en plus utilisé en ce début de xxie siècle de quotient émotionnel.

Comme beaucoup de savants provenant des sciences de la nature, il a émis sans précautions oratoires des idées sur la psychologie collective qui parurent choquantes :

la tendance des groupes à la soumission à l'autorité se trouve démultipliée dès lors que des événements sont théâtralisés, orchestrés et utilisés par des leaders pour pousser à l'action un groupe, qui, alors, devient « foule ».
Ce groupe peut être les participants à une assemblée générale, à une manifestation, mais aussi à un jury d'Assises ou à toute autre forme institutionnelle de réunion.
Voilà qui ne pouvait que déplaire à des sociologues qui, comme le notera plus tard Pierre Bourdieu, ont tendance à légitimer parfois au-delà du raisonnable leur objet d'études : la classe politique — qui, pourtant, était confrontée à cette époque au spectacle délétère de débats à l'Assemblée nationale, où, parfois, on criait « À mort ! » (contre Ferry dans l'affaire du Tonkin, par exemple).

Les idées de Le Bon se sont trouvées largement vérifiées, ainsi la tendance des masses à se plier à la servitude volontaire. « Le fait que le régime totalitaire, écrit Hannah Arendt à ce sujet, malgré l’évidence de ses crimes, s’est appuyé sur les masses, est profondément troublant. » (Les origines du totalitarisme, Éditions du Seuil, 1950).

Le Bon peut aussi être considéré comme le précurseur de la notion de « public », aujourd'hui utilisée en sociologie des médias. En effet, une « foule », au sens psycho-sociologique du terme, peut ne pas être réunie physiquement (ainsi les téléspectateurs ou les internautes) ; ses membres forment, à un moment donné, une communauté qui participe à une même activité et partage les mêmes émotions. Mort en 1931, il a pourtant pu mesurer l'impact futur que seraient appelés à avoir les mass-media : « Avec les moyens actuels de publicité, consignait-il en 1924, une opinion ou une doctrine peut être lancée comme un produit pharmaceutique quelconque. »

Œuvres
Bibliographie établie d'après celle présente dans la réédition de 1984 de Psychologie du socialisme [archive] par Les Amis de Gustave Le Bon (cf. pages 415 [archive]-416 [archive]).
Ouvrages médicaux
La mort apparente et inhumations prématurées (1866) Lire en ligne sur Gallica [archive].
Traité pratique des maladies des organes génitaux-urinaires (1869)
La vie (Traité de physiologie humaine) (1874) Lire en ligne sur Gallica [archive].
Voyages, histoire et psychologie
Voyage aux Monts-Tatras (1881)
L'Homme et les sociétés - Leurs origines et leur histoire (1881). Réédition : Jean-Michel Place, 1988 (ISBN 2-85893-099-6)
La Civilisation des Arabes (1884). Réédition : Éditions de la Fontaine au Roy, Collection "Images et Traditions", 1990 (ISBN 2-84132-005-7)
Voyage au Népal (1886)
Histoire des Civilisations de l'Inde (1886, edit. Firmin-Didot)
Les Premières Civilisations de l'Orient (1889) Lire en ligne sur Gallica [archive].
Les Civilisations de l'Inde (1893)
Les Monuments de l'Inde (1893)
Les lois psychologiques de l'évolution des peuples, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine» (1894)
Psychologie des Foules (1895). Réédition : Paris, Presses universitaires de France, Collection Quadrige, 1988 (ISBN 2-13054-297-2) Lire en ligne sur Gallica [archive]
Psychologie du socialisme, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine» (1898). Réédition : Deterna, Collection "Politiquement incorrect", 2008 (ISBN 2-91304-479-4)
Psychologie de l'éducation (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1902). Réédition : Deterna, Collection "Politiquement incorrect", 2009, préface par Pierre Chaunu (ISBN 2-91304-493-X)
La Psychologie politique et la défense sociale (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1910). Réédition : Deterna, Collection "Politiquement incorrect", 2009 (ISBN 2-91304-492-1) Lire en ligne [archive], lire en ligne sur Gallica [archive]
Les Opinions et les croyances (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1911)
La Révolution française et la psychologie des révolutions (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1912). Réédition : Deterna, Collection "Politiquement incorrect", 2008 (ISBN 2-91304-480-8)
Aphorismes du temps présent (1913)
La Vie des vérités (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1914). Réédition : Deterna, Collection "Politiquement incorrect", 2008 (ISBN 2-91304-494-8)
Enseignements psychologiques de la guerre européenne (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1915). Réédité sous le titre Psychologie de la Guerre, Paris, Éditions du Trident, 2006
Premières conséquences de la guerre: transformation mentale des peuples (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1916)
Hier et demain. Pensées brèves (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1918) Lire en ligne sur Gallica [archive].
Psychologie des temps nouveaux (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1920)
Le Déséquilibre du monde (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1923)
Les Incertitudes de l'heure présente (1924)
L'évolution actuelle du monde, illusions et réalités (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1927)
Bases scientifiques d'une philosophie de l'histoire (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1931) Lire en ligne sur Gallica [archive].
Recherches scientifiques
La Méthode graphique et les appareils enregistreurs (1878)
Recherches anatomiques et mathématiques sur les variations de volume du cerveau et sur leurs relations avec l'intelligence (1879)
La Fumée du tabac (1880) Lire en ligne sur Gallica [archive].
Les Levers photographiques (1888) Lire en ligne sur Gallica [archive].
L'Équitation actuelle et ses principes. Recherches expérimentales (1892) Lire en ligne sur Gallica [archive].
L'évolution de la matière (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1905) Lire en ligne sur Gallica [archive]. Lire en ligne sur la BNAM [archive]
La naissance et l'évanouissement de la matière (1907) Lire en ligne sur Gallica [archive]. Lire en ligne sur la BNAM [archive]
L'évolution des forces (Flammarion - Bibliothèque de philosophie scientifique - 1907) Lire en ligne [archive]. Lire en ligne sur la BNAM [archive]
Articles scientifiques
« Sur l'utilisation des forces naturelles et leur transport », Revue Scientifique, 20 août 1881
« Les Forces de l'avenir », Revue Scientifique, 8 octobre 1881
« L'Électricité et les forces de l'avenir », Revue Scientifique, 5 novembre 1881
« L'Anthropologie actuelle et l'étude des races », Revue Scientifique, 17 décembre 1881
« Sur la formation actuelle d'une race dans les monts Tatras », Revue Scientifique, 18 mars 1882
« La Civilisation des arabes et l’étude scientifique de l’histoire », Revue Scientifique, 1er décembre 1883
« L'Inde moderne. Comment on fonde une colonie, comment on la garde et comment on la perd », Revue Scientifique, 20 novembre 1886
« Influence de l’éducation et des institutions européennes sur les populations indigènes des colonies », Revue Scientifique, 24 août 1889
« La Psychologie des femmes et les effets de leur éducation actuelle », Revue Scientifique, 11 octobre 1890
« Les Recherches récentes sur la noix de Kola », Revue Scientifique, 22 octobre 1893
« La Psychologie des foules », Revue Scientifique, 6 & 20 avril 1895
« La Luminescence invisible », Revue Scientifique, 28 janvier 1899
« De la transparence des corps opaques pour des radiations lumineuses de grande longueur d’onde », Revue Scientifique, 11 février 1899
« Le Rayonnement électrique et la transparence des corps pour les ondes hertziennes », Revue Scientifique, 29 avril 1899
« L’Uranium, le radium et les émissions métalliques », Revue Scientifique, 5 mai 1900
« Les Formes diverses de la phosphorescence », Revue Scientifique, 8 & 15 septembre 1900
« La Variabilité des espèces chimiques », Revue Scientifique, 22 décembre 1900
« La Matérialisation de l'énergie », Revue Scientifique, 15 octobre 1904
« La Dématérialisation de la matière », Revue Scientifique, 12 et 19 novembre 1904
« Le Monde intermédiaire entre la matière et l'éther », Revue Scientifique, 10 et 17 décembre 1904
« La Dématérialisation de la matière comme origine de la chaleur solaire et de l’électricité », La Nature, no 1699 - 16 décembre 1905
« L'Édification scientifique de la connaissance », Revue Scientifique, 1er & 8 février 1908
« Le Rôle de la vitesse dans les phénomènes », La Nature, no 1855 - 12 décembre 1908
« La Renaissance de la magie », Revue Scientifique, 26 mars & 2 avril 1910
« Le Spiritisme et la science », La Nature, no 1962 - 31 décembre 1910
« Programme d’expériences permettant de résoudre d’une façon définitive le problème de la baguette divinatoire », La Nature, no 2085, 10 mai 1913
« Transformations apparentes des peintures en sculpture », La Nature, no 2847, 15 décembre 1930
Bibliographie
Raymond Queneau, Gustave Le Bon, Sixtus Éditions, Limoges, 1990, "Petite Bibliothèque Quenienne" n°4 (texte définitif établi par Mary-Lise Billot, Marc Bruimaud & Marcel Troulay).
Elias Canetti, Masse et Puissance (1960)
Serge Moscovici, L'Âge des foules, Fayard, coll. « LITT.GENE. », 2005 (ISBN 978-2213628073)
Catherine Rouvier,
Les idées politiques de Gustave le Bon ou la mesure de l'irrationnel en politique. PUF 1986, préface d'Edgar Faure.
Gustave Le Bon, clés et enjeux de la psychologie des foules, Editions Terra Mare, Coll. Les Classiques, 2012
Benoît Marpeau, Gustave Le Bon : Parcours d'un intellectuel, CNRS Éditions, 2000.
Vincent Rubio, « La Psychologie des foules de Gustave Le Bon. Un savoir d'arrière-plan », Sociétés, Revue des sciences humaines et sociales, 2008/2, no 100.
Vincent Rubio, « Le regard sociologique sur la foule à la fin du xixe siècle », Mil Neuf Cent. Revue d’Histoire intellectuelle, no 28, p. 13-33.
Korpa, Gustave Le Bon hier et aujourd'hui, Éditions France-Empire, 2011 (préface de Claude Imbert) (ISBN 9782704810871)
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Psychologie politique et défense sociale, UltraLetters, 2013 (ISBN 978-2930718460)
Psychologie de l'éducation, UltraLetters, 2013 (ISBN 978-2930718477)
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